Réflexion

L’Europe de borne en borne

il y a 3 ans

Besoin de changer d’air ? Surtout, ne vous privez pas, prenez la route destination ailleurs. Oui, mais si cet ailleurs est à plus de mille kilomètres de chez vous, pas sûr que vous partirez avec votre voiture électrique. Telle est la conclusion d’une enquête menée par Lampiris.

Or, si elle était complexe il y a encore quelques années, la traversée de l’Europe en voiture électrique est désormais envisageable. Bien sûr, ça ne va pas tout seul, comme qui dirait l’autre, mais n’empêche, c’est jouable grâce à de puissants réseaux de bornes implantés sur les axes de circulations les plus fréquentés… dont on peut même s’écarter, puisqu’aujourd’hui tout ou presque est possible en voiture électrique. A condition d’opérer avec méthode et anticipation.   

 

Dans les grandes lignes

Commençons par dresser le tableau des plus et des moins. Près de 300.000 points de recharge publics sont actuellement déployées en Europe. C'est quatre fois plus que les 67 000 comptabilisés en 2015. Pourtant, si cette hausse est encourageante, la répartition sur le territoire de l’UE est très inégale, ce qui complique les déplacements. Selon un rapport de l’EAFO* qui a analysé la situation dans 32 pays, ils sont 5 à concentrer 73% des bornes publiques du continent : les Pays-Bas, la France, l’Allemagne, l’Italie et la Suède. La densité d'installation est également très variable : alors que la moyenne européenne s'élève à 13 points de recharge aux 100 km², nos voisins néerlandais font figure de leader avec 160 pour 100 km² ! En queue de peloton, comptant moins de 2 points par 100 km² : la Bulgarie, la Croatie, Chypre, l'Estonie, la Grèce, la Lettonie, la Lituanie et la Slovaquie. Autre faiblesse de l’électrique sur notre continent : les systèmes de paiement ne sont pas harmonisés et les utilisateurs n’ont pas accès à suffisamment d'informations en temps réel.

Parce que la logique l’impose

D’aucuns y verront de bonnes raisons de ne pas s’aventurer loin de chez eux avec leur voiture électrique ou leur plug-in. D’accord, mais le parc des bornes s’étoffe chaque jour un peu plus, parce que la logique l’impose (et l’UE l’exige - CQFD !). Il faut dire que les ambitions de l’Union Européenne en matière d’électrification sont impressionnantes, misant sur 30 millions de voitures électriques en 2030. Pour soutenir cet objectif, le plan estime à 3 millions le nombre de bornes de recharge publiques nécessaires.

 

Persévérer, voilà tout…

Dans ce dossier, vous l’aurez compris, tout est affaire de volonté politique et de rentabilité si l’on se place du côté des producteurs d’énergie. Dès lors, la collaboration entre privé et public doit être optimale pour parvenir à tenir la cadence… ou rattraper les retards. Petit retour en arrière. En 2020, 539.000 véhicules neufs à batteries et 507.000 hybrides rechargeables ont trouvé preneurs dans l’UE. En regard de ces chiffres, souvenons-nous que le nombre de points de recharge ouverts au public dans l'EU-27 et au Royaume-Uni est passé d'environ 34.000 en 2014 à 250.000 en septembre 2020. On applaudit ?... Du bout des doigts, car ce n’est pas satisfaisant si l’on s’en tient à l'estimation de 440.000 points de recharge figurant dans le plan d'action 2017. Si le déploiement des infrastructures continue au rythme de la période 2014-2020, il y a fort à parier que l'objectif du million de points de recharge ouverts au public à l'horizon 2025 ne sera pas atteint alors que 13 millions de véhicules à émission(s) nulle ou faibles seront attendus au sein des Etats Membres.

 

Mettre le paquet

Pour combler l'écart, environ 150.000 nouveaux points devront s’ajouter chaque année, soit 3.000 par semaine ! C’est ce que prévoit désormais le Pacte Vert (ou « Green Deal »). Mais quand on sait que fin 2020, 13 pays n’étaient pas capables de fournir le niveau de maillage recommandé d’au moins un point de recharge ouvert au public pour 10 véhicules électriques, il est clair que l’Europe va devoir mettre le paquet pour implanter et financer. Surtout financer, le budget global pour l’installation des 3 millions de bornes s’élevant à 80 milliards d’euros.

 

Du bon et du très bon

Tout ceci ne vous incite pas à l’optimisme ? Or, il y a aussi du bon et du très bon dans ce gigantesque chantier. Aux Pays-Bas, on recense plus de 66.000 points de recharge. La Belgique n’en est pas encore là, l'Allemagne non plus d’ailleurs, mais avec 13 points aux 100 km², il n’y a pas de quoi rougir. Idem pour la France et l’Italie qui approchent les 11 points. La Suède et le Danemark font mieux, mais sans atteindre, évidemment, les scores du pays des tulipes. Et on ne vous parle pas des excellents résultats de la Norvège et de la Suisse qui n’apparaissent pas dans les relevés de l’UE. Quant aux ex-pays de l’Est, ils progressent à une cadence très soutenue pour combler leur déficit, surtout la Lituanie et Lettonie, les seuls vrais « mauvais élèves de la classe » étant la Pologne et la Bulgarie.     

 

 (*) European Alternative Fuels Observatory

 

Mots-clés: Réflexion Actualités
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